LECTURES BIBLIQUES
Jérémie 33, v. 14 à 16
33.14 Voici, les jours viennent, dit l’Éternel, Où j’accomplirai la bonne parole Que j’ai dite sur la maison d’Israël et sur la maison de Juda.
33.15 En ces jours et en ce temps-là, Je ferai éclore à David un germe de justice ; Il pratiquera la justice et l’équité dans le pays.
33.16 En ces jours-là, Juda sera sauvé, Jérusalem aura la sécurité dans sa demeure ; Et voici comment on l’appellera : L’Éternel notre justice.
Luc 21, v.25 à 36
21.25 Il y aura des signes dans le soleil, dans la lune et dans les étoiles. Et sur la terre, il y aura de l’angoisse chez les nations qui ne sauront que faire, au bruit de la mer et des flots,
21.26 les hommes rendant l’âme de terreur dans l’attente de ce qui surviendra pour la terre; car les puissances des cieux seront ébranlées.
21.2 Alors on verra le Fils de l’homme venant sur une nuée avec puissance et une grande gloire.
21.28 Quand ces choses commenceront à arriver, redressez-vous et levez vos têtes, parce que votre délivrance approche.
21.29 Et il leur dit une comparaison: Voyez le figuier, et tous les arbres.
21.30 Dès qu’ils ont poussé, vous connaissez de vous-mêmes, en regardant, que déjà l’été est proche.
21.31 De même, quand vous verrez ces choses arriver, sachez que le royaume de Dieu est proche.
21.32 Je vous le dis en vérité, cette génération ne passera point, que tout cela n’arrive.
21.33 Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point.
21.34 Prenez garde à vous-mêmes, de crainte que vos cœurs ne s’appesantissent par les excès du manger et du boire, et par les soucis de la vie, et que ce jour ne vienne sur vous à l’improviste;
21.35 car il viendra comme un filet sur tous ceux qui habitent sur la face de toute la terre.
21.36 Veillez donc et priez en tout temps, afin que vous ayez la force d’échapper à toutes ces choses qui arriveront, et de paraître debout devant le Fils de l’homme.
—————————————————————————————————————–
Spontané n° 22/09, strophes 1 et 4 « La Parole est à Dieu… »
PREDICATION
Introduction
En préparant cette prédication je suis tombé, par hasard diraient certains, avec l’aide de l’Esprit dirais-je plus volontiers, sur un recueil de quelques prédications de la Pasteure Corinne AKLI, dont précisément une du 1er dimanche de l’Avent.
Corinne, lorsqu’elle était en poste à Aubervilliers, est venue une fois ici à Marly pour une formation de prédicateurs laïcs. Je me souviens encore des conseils et suggestions qu’elle nous avait faits à l’époque.
Corinne est décédée en 2023 mais elle avait eu le temps de rédiger trois commentaires pour le « Parole pour tous » de cette année 2024 : en particulier, le 26 septembre dernier, elle avait fait un commentaire intitulé Prophétisme ou populisme, sur quelques versets de Jérémie (ch. 28) où elle disait : « Non, Jérémie ne prête pas attention aux fake-news et aux propos bruyants qui attisent et captivent les foules. » Une vision claire de ce que nous avons vécu récemment.
Tout ça pour dire que je n’ai aucun scrupule à reprendre ici quelques passages de cette prédication d’un 1er dimanche de l’Avent, qu’elle nous a laissée.
Le temps de l’Avent est par excellence celui de l’attente.
Le verbe « attendre » a de multiples significations : espérer, prévoir, souhaiter, mais aussi patienter, retarder, temporiser…On dit qu’il est urgent d’attendre, c’est-à-dire de ne pas bouger, de ne rien faire. Parfois on attend patiemment, d’autres fois nous sommes très impatients quand on attend « désespérément » un bus, ou un coup de fil qui ne vient pas ou un courrier important. Victor Hugo ne pouvait plus attendre quand il écrit à sa fille ce poème d’amour :
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Mais si on dit « Ma voisine attend un bébé », alors le mot attendre prend un sens plus dense et plus profond. Dire d’une jeune femme qu’elle attend, c’est reconnaître que toute sa vie présente est en désir de la délivrance qui fera d’elle la maman du bébé qu’elle chérira et qui illuminera la vie de toute la maisonnée.
Attendre Celui qui vient, c’est ce qui nous attend en ce 1er dimanche de l’Avent ! C’est se mettre en état de désir, reconnaître que quelque chose – ou plutôt quelqu’un ! – nous manque. Nous tenir prêts à faire de sa venue une raison de vivre. Durant les 4 semaines qui nous séparent de Noël, on ne nous demande pas simplement d’attendre, mais encore de veiller. Contrairement à nos téléphones qui nous avons mis en veille, nous n’avons pas à devenir silencieux et hors-service ! Au contraire.
Veiller, c’est persister à attendre, à un moment où nous pourrions légitimement dormir. Veiller avec persévérance alors que les autres s’endorment et peuvent se laisser engourdir de douce chaleur.
C’est donc une attente active qui demande des ressources d’énergie pour tenir bon et rester mobilisé. Comme les batteries de nos portables, nous devons rester en charge si nous voulons être utiles au bon moment. Pas question de dire « Désolé, ma batterie est à plat, rappelle-moi demain ! », comme dans la parole des 10 jeunes filles, dont la moitié n’a plus d’énergie en réserve. Le temps de l’Avent nous rappelle l’effort nécessaire pour rester vigilants, éveillés, réveillés,… veilleurs !
Entrer dans la salle d’attente : pour attendre qui ?
Peut-être convient-il d’abord de se rapprocher de « celui qui doit venir ». Comment y arriver ?
D’abord par la prière : à travers nos nombreuses préoccupations, nous risquons d’oublier l’aspect profondément militant de la prière. C’est elle qui nous invite à créer un espace pour Dieu dans nos vies de tous les jours. Sinon nous risquons de faire comme les gens de Bethléem : « Il n’y avait plus de place pour Marie, Joseph et l’enfant dans l’auberge » (Luc 2 v.7). La prière nous ouvre cet espace-voyageurs, cette salle d’attente 1ère classe où nous nous préparons à repartir avec notre hôte le jour de Noël. Le militantisme de la prière, nous le connaissons bien à l’ACAT et c’est d’ailleurs la seule chose qui nous différencie d’Amnesty International. Nous en connaissons l’efficacité grâce aux anciens prisonniers venus témoigner avoir ressenti sa force et venus nous parler de l’aide que leur avait apporté le fait de savoir que des chrétiens priaient pour eux.
Après la prière, il y a aussi la lecture de la Parole. Peut-être ces derniers temps avons-nous été moins assidus dans notre lecture quotidienne de la Bible. Novembre est pour beaucoup un mois pénible, mais aujourd’hui on est le 1er dimanche de l’Avent et c’est le bon moment pour s’y remettre, s’accorder un quart d’heure par jour pour relire les pales du Seigneur et ses promesses… un quart d’heure pour lui dire : « Seigneur je t’attends, je m’attends à te voir, car je sais que tu m’attends… »
Entrer dans la salle d’attente : pour y faire quoi ?
Comme il nous a été demandé de veiller, on peut commencer par réfléchir à ce monde dans lequel nous sommes. Notre texte de Luc 21v.25 nous rappelle : « Et sur la terre, il y aura de l’angoisse chez les nations qui ne sauront que faire, au bruit de la mer et des flots… », mais en plus de l’angoisse écologique, il y a aussi un péril pour la démocratie qui se fait de plus en plus présent, une menace pour le « vivre-ensemble » dans la mesure où beaucoup sont poussés à rechercher des gens qui pensent comme eux et à éviter ceux qui ont des pensées différentes. On a pu voir récemment la force des « fake-news », qui séparent, qui divisent et génèrent des affrontements et la montée de la violence et même de la haine !
L’Avent doit devenir pour nous un style de vie, une attitude constante d’imagination créatrice, d’espérance permanente et attention aux petits signes que Dieu dépose sur nos routes comme des petits cailloux blancs pour servir de repères sur notre chemin. Malgré tous les problèmes, toutes les calamités, tous les imprévus, nous savons que la vie vaut la peine d’être vécue et que la mort n’est pas la fin de tout.
L’Avent nous donne une raison de vivre, une raison d’aimer et d’espérer maintenant ! C’est une invitation à construire un monde meilleur, selon le désir de Dieu. Esaïe résumait bien la paix voulue par Dieu : « De leur épées, ils forgeront des socs de charrue, et de leurs lances des faucilles. On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on ne s’entraînera plus pour la guerre » (Esaïe 2 v.4). Le projet de Dieu pour nous est un projet de paix et de fraternité. Il est clair que nous en sommes loin, mais saurons-nous orienter notre vie dans la direction souhaitée par Dieu ?
Rester à l’écoute du monde en faisant le tri entre les faits et les fake-news, entre ce qui est négatif et ce qui est positif ?
D’ailleurs nous sommes surtout sur du positif avec le festival « Liberté, j’écris ton nom » en ce moment au cinéma Fontenelle. Hier l’ACAT présentait un film : « En toute liberté : une radio pour la paix », une radio en Irak et en Syrie où des journalistes femmes et hommes, musulmans, chrétiens et yésidis travaillent ensemble pour rassembler et faire vivre un idéal de dialogue, de paix, voire de réconciliation. Cet après-midi, c’est le film Souleymane, qui montre un demandeur d’asile, essayant de survivre à Paris avant sa convocation à l’OFPRA, l’Office Français Pour les Réfugiés et Apatrides.
Se tenir prêts
Ce qui nous est demandé est donc de tourner notre attention vers ce qui est positif ; ne pas se laisser envahir par ce qui se dit dans les écoles de journalisme : une bonne nouvelle n’est pas une nouvelle, mais les mauvaises nouvelles, c’est ça qui est vendeur ! Et on retrouve bien cette idée dans ce qui s’échange aujourd’hui sur les réseaux sociaux.
C’est d’ailleurs ce qui me plait dans la mini parabole qui prend 2 lignes dans le texte de Luc : « Voyez le figuier, et tous les arbres. Dès qu’ils ont poussé, vous connaissez de vous-mêmes, en regardant, que déjà l’été est proche. De même, quand vous verrez ces choses arriver, sachez que le royaume de Dieu est proche. » Ce qui me plait, c’est que le Seigneur nous fait confiance pour lire les signes des temps ; avec notre grille de lecture, bien sûr, à savoir que toutes choses sont entre les mains de Dieu et que nous avons juste à vivre debout, la vie qui nous a été donnée, en distinguant ce qui est positif pour nous et pour le monde de ce qui est négatif et va à l’encontre du vivre-ensemble. Il nous fait confiance pour qu’après les mauvaises nouvelles que nous recevons tous les jours, nous puissions être des signes du royaume qui vient.
Et le royaume est proche, nous dit notre texte, et en plus, cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive ! Et il en est passé beaucoup de génération ! Mais Antoine Nouis nous suggère (je cite) de comprendre que Jésus nous parle de notre vie de foi : chaque génération doit considérer qu’elle ne passera pas avant la venue du Christ. Cette venue est comme un aiguillon qui nous appelle à ne pas nous assoupir …
Devenir veilleur
Nous sommes donc bien invités à veiller, veiller au grain, celui qui arrive brusquement comme un coup de vent inattendu et brutal. Veiller ce n’est pas rester les bras croisés, se disant que ce qui doit arriver arrivera. Veiller, ce n’est pas non plus s’agiter en tous sens. Veiller, c’est rester ouvert à l’inattendu de Dieu. Ce temps de l’Avent où nous entrons nous apprend à être attentifs à sa présence invisible mais bien réelle. Cette présence invisible, c’est elle qui nous conforte dans le « N’ayez pas peur », souvent cité dans les évangiles : en dépit de tous les évènements inquiétants qui nous questionnent.
Veiller, c’est revêtir l’habit de service, se mettre à l’ouvrage et rester en état d’alerte. Chaque instant peut être celui où le Christ frappe à notre porte. Acceptons de le recevoir avec joie !
Philippe Westercamp, décembre 2024