Prédication « L’Estive » 4 : la montagne, refuge et révélation

par Jean-Marie de Bourqueney

Estive 4 : la montagne

« Estives » 2025 : la nature, un besoin spirituel !

Cet été, nous vous proposons, à la place des habituelles prédications du dimanche, des méditations bibliques, sous la forme d’une « estive biblique », comme un troupeau qui sort de l’étable pour rejoindre les « verts pâturages » (Psaume 23). Il s’agit de prendre le temps de se décaler et, pour cette année, de réfléchir à notre rapport à la nature et à nous-mêmes, comme une occasion spirituelle.  

 

Étape 4 : la montagne, refuge et révélation

Pour cette quatrième étape de l’estive, nous vous proposons de réfléchir sur notre rapport à la montagne, qui attire les vacanciers épris de grands paysages et d’air pur, mais aussi nourrit les textes bibliques.

Exode 34, 1-6

Le Seigneur donna cet ordre à Moïse : « Taille deux tablettes de pierre, semblables aux précédentes, que tu as fracassées ; j’y inscrirai les commandements qui figuraient sur les premières. Sois prêt pour demain matin. À l’aube, tu monteras au sommet du mont Sinaï et tu m’y attendras. Que personne ne t’accompagne ! Que personne non plus ne se montre ailleurs sur la montagne ; que même aucun animal – mouton, chèvre ou vache – ne vienne paître à proximité ! » Moïse tailla deux tablettes de pierre, semblables aux précédentes. Tôt le lendemain matin, il monta sur le Sinaï, conformément à l’ordre du Seigneur ; il emportait les deux tablettes. Le Seigneur descendit dans la colonne de nuée et se tint là, à côté de Moïse. Il proclama son nom : « Le Seigneur ». Puis il passa devant Moïse en proclamant encore : « Je suis le Seigneur ! Je suis un Dieu plein de tendresse et de bienveillance, lent à la colère, riche en bonté et en vérité. (Nouvelle Français Courant)

Matthieu 17, 1-5

Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, frère de Jacques, et les conduit à l’écart sur une haute montagne. Il fut transformé devant eux ; son visage se mit à briller comme le soleil et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. Soudain Moïse et Élie leur apparurent et tous deux parlaient avec Jésus. Pierre dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici. Si tu le veux, je dresserai ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Élie. » Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse vint les couvrir, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui je mets toute ma joie. Écoutez-le ! »

 

 

Un ami paroissien, très montagnard, me disait combien il avait besoin de la montagne. Il racontait qu’il y vivait des moments de grâce, des temps spirituels de haute intensité. Cela rejoint sans doute une thématique très biblique. Autant la mer est souvent perçue dans la Bible comme une menace, autant la montagne est le lieu de la Révélation. Du don des tables de la Loi à Moïse sur le mont Sinaï à la transfiguration du christ, les auteurs bibliques emploient ce symbole de la montagne pour dire le lien qui nous unit à Dieu. En montant sur la montagne, on s’approche de Dieu en quelque sorte, mais sans jamais l’atteindre puisque dans chacun de ces récits, Dieu descend du ciel. Même dans le récit mythologique de la Tour de Babel, les humains ont beau atteindre le ciel avec cette tour très haute, Dieu a encore besoin de descendre pour leur parler. Dieu est toujours plus loin que ce l’on en dit. Il y aurait effectivement une tentation à croire que l’on peut toucher Dieu en prenant de de l’altitude. Le Ciel de Dieu sera toujours plus haut que les montagnes de notre planète.

Mais c’est vrai qu’il existe, au-delà même de la question spirituelle, une course à la plus haute altitude, à l’exploit. C’est pour certains une immense satisfaction d’avoir « fait » le Mont Blanc ; à tel point qu’il faut maintenant en réguler l’accès… La montagne se mérite, elle nécessite un effort humain important. Les Tours de France cyclistes se gagnent dans les cols les plus hauts, et nous admirons ces héros de l’effort.

Mais il est vrai que lorsque l’on se retrouve en haut d’une montagne ou même d’un col, il y a aussi cette dimension de la contemplation des grands espaces. On reste subjugué par cette nature qui a pu fabriquer de tels reliefs et de tels points de vue. Dans certains lieux, on peut voir très loin, à plus d’une centaine de kilomètres. On se rend compte alors de notre petitesse dans cette immensité de la nature. On devient alors simple créature au milieu de la Création. De plus, même si cela est parfois devenu moins vrai dans certains lieux fréquentés par des personnes peu respectueuses de cet environnement, la montagne conserve son caractère authentique et sauvage. La quasi-totalité de nos plaines est modelée par la main de l’homme, pas la haute montagne. Mais si elle demeure effectivement sauvage, elle peut être un indice important de la modification climatique provoquée par l’être humain : disparition progressive des glaciers, chutes de blocs de pierre. La montagne est le thermomètre de notre planète.

La montagne peut être aussi un refuge, une retraite. Le prophète Élie, craignant pour sa vie, s’y réfugia, et s’y ressourça. Dans l’histoire chrétienne, un grand nombre de monastères furent construits dans les montagnes, afin de s’écarter du bruit et du tumulte du monde. Il est sans doute important de se ressourcer dans ces immensités, d’y respirer un air plus pur et de contempler, en silence et avec humilité, cette puissance de la Création. La montagne se transforme alors en méditation, voire en prière….

 

Annexe : texte de Michel de Certeau, théologien jésuite

Dieu infini

« Il n’est pas possible de dire simplement « comme ça » que Dieu est là. Il est pour nous question d’absolu, de vérité, d’un Infini. C’est quelqu’un ou quelque chose qui n’est pas déterminable, qui ne peut pas être détenu, qui n’est pas surmontable. A cause de cela, on peut aussi l’appeler l’au-delà, qui n’est pas plus en haut, ou plus en bas, ou plus à droite, ou plus à gauche. Il est l’au-delà parce qu’il est toujours plus loin que là où nous le cherchons. Nous ne pouvons le saisir nulle part, mais nous apprenons qu’il est infini par la démarche indéfinie qui le cherche après l’avoir reçu ou qui l’appelle après l’avoir perçu. L’infini pour nous, c’est l’esprit de cet itinéraire indéfini. Nous ne pouvons jamais circonscrire dans nos concepts, dans notre affectivité, dans notre expérience commune ou solitaire celui qui, par définition, est au-delà. »

Extrait de « l’expérience spirituelle », article paru dans Christus en 1970

Jean-Marie de Bourqueney

 

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Vidéo « Estive »  sur YouTube : https://youtu.be/pHPR_wzaFws

 

 

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